Benoît Raphaël

CSA, Twitter et Facebook : on efface tout...

9 Juin 2011 , Rédigé par Benoit Raphaël Publié dans #Daily, #Weekly, #Christine Kelly, #CSA, #facebook, #Michel Boyon, #Twitter

L'heure était grave, Michel Boyon, le président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, s'est donc fendu d'une tribune dans le journal Le Monde pour rappeler à l'ordre cette toile qui, avec ce "formidable culot", a encore tout mélangé dans "l'excitation" et "l'exaltation" qui lui est propre... Michel Boyon a donc pris sa plume pour remettre les pendules à l'heure. Ou pour "rétropédaler", comme le traduit  laconiquement l'avocat blogueur Rubin Sfadj sur Twitter. On rappelle les faits, et on s'arrêtera là parce que cette polémique a surtout commencé, et enflé, avec le sourire. Et ne justifie pas que l'on s'étripe (vieille habitude française...).

1) Le CSA publie une décision prise le 12 avril, à travers laquelle il considère que, pour un média audiovisuel, renvoyer vers une page Twitter ou Facebook, est contraire à la loi. Voici le verbatim de la décision publiée le 27 mai sur le site Internet du CSA : “Le Conseil a été saisi par une chaîne de télévision de la conformité à la réglementation en matière de publicité des renvois aux pages consacrées à ses émissions sur des sites de réseaux sociaux. Il considère que le renvoi des téléspectateurs ou des auditeurs à la page de l’émission sur les réseaux sociaux sans les citer présente un caractère informatif, alors que le renvoi vers ces pages en nommant les réseaux sociaux concernés revêt un caractère publicitaire qui contrevient aux dispositions de l’article 9 du décret du 27 mars 1992 prohibant la publicité clandestine.

Dans ce texte, le CSA "interdit bien" aux télévisions et aux radios de renvoyer vers la page Facebook ou Twitter d'une émission. Elle considère cependant que renvoyer vers cette page en remplaçant "Facebook" ou "Twitter" par "réseaux sociaux" présentait un caractère informatif. C'est cette décision qui est absurde, comme je le relevais le 28 mai sur mon blog. Et je ne relevais que cet aspect là. Quand soudain...

2) Explication de texte le 30 mai, par Christine Kelly, conseillère au CSA, citée par l'AFP : elle confirme la décision. Mais elle ajoute : ""On peut dire: +le ministre X qui s'est exprimé sur les réseaux sociaux+".? Ceux-ci "ne sont pas des sources d'informations, ce sont des moyens dont les gens usent pour y diffuser de l'information". Donc, quand Michel Boyon affirme : "Le CSA at-il "interdit" à une chaîne de parler de tel réseau social de façon informative, par exemple pour indiquer comment une nouvelle lui était parvenue ? Bien sûr que non." Il se trompe. Mais l'AFP a peut-être mal retranscrit les propos de Christine Kelly. D'ailleurs :

3) Le 7 juin, elle se corrige (ou "rétropédale", comme dirait l'ami Rubin...) en expliquant au Figaro : “Lors de la citation à l’antenne de messages mentionnant Twitter, on n’est plus dans de la publicité, mais dans une mission d’information. Dans ce cadre-là, on regardera évidemment les choses avec plus de distance”.

4) Le 9 juin, Michel Boyon re-rétropédale en affirmant que le CSA n'a pas interdit aux chaînes de télévision de renvoyer vers leurs pages Facebook ou Twitter : Le CSA "a-t-il même seulement interdit à une chaîne de renvoyer le public vers le réseau social où elle possède une page ou un compte ? Non : comme dans tous les autres cas dont il est saisi, seul un caractère promotionnel affirmé pourrait justifier l'ouverture d'une procédure contre la chaîne." Retour au verbatim du 27 mai : Le CSA "considère que le renvoi des téléspectateurs ou des auditeurs à la page de l’émission sur les réseaux sociaux sans les citer présente un caractère informatif, alors que le renvoi vers ces pages en nommant les réseaux sociaux concernés revêt un caractère publicitaire qui contrevient aux dispositions de l’article 9 du décret du 27 mars 1992 prohibant la publicité clandestine. Bref, on pourrait s'amuser encore longtemps.

Mais le débat n'est pas là, comme je le rappelais lundi dernier : "On peut effectivement s’interroger sur cette nouvelle réalité : le fait que des espaces et des outils citoyens dominants soient aujourd’hui la propriété d’entreprises privées internationales. Faut-il en avoir peur ? Quelles garanties de respect des libertés pourra-t-on demander à ces entreprises lorsque non plus 10% comme aujourd’hui mais 20, 30% de la population mondiale dépendront de leurs services pour échanger avec leurs proches ou d’autres citoyens ?" Mais l'affaire est close. Les chaînes de télévision pourront continuer à renvoyer vers leurs pages Facebook ou Twitter en les nommant. Tout va bien. On passe à autre chose ?

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