Benoît Raphaël

Cette start-up a tellement d'audace qu'elle a failli ne pas lever d'argent en France. Aujourd'hui Bunkr part enfin à l'assaut de Microsoft

2 Juin 2014 , Rédigé par Benoît Raphaël Publié dans #entreprenariat, #bunkr, #France, #start-ups

C'est l'histoire de trois gars qui se sont installés à Rouen pour payer moins cher et qui ont décidé de s'attaquer à l'un des plus gros monopoles de l'histoire du logiciel : Microsoft. Comme ça. La start-up s'appelle Bunkr. Vous en avez peut-être entendu parler récemment : ils viennent de réussir leur première levée de fonds. 1M€. Et quelques parrains prestigieux qui ont été séduits par l'audace de ces flibustiers qu'ont croirait sortis d'une BD. Car c'est bien d'audace qu'il s'agit, et c'est justement la raison pour laquelle j'ai envie de vous raconter leur histoire. Parce qu'elle est inspirante. Parce qu'elle est pleine d'énergie. Et que par les temps qui courent, ça fait du bien...

Cette start-up a tellement d'audace qu'elle a failli ne pas lever d'argent en France. Aujourd'hui Bunkr part enfin à l'assaut de Microsoft

Bon, déjà, Alexis Jamet, l'un des co-fondateurs, a une vraie tête de pirate méchant. Avec sa barbe noire plus longue que ses cheveux et son t-shirt Bunkr qu'il porte comme un étendard. Des cheveux qu'il a en partie perdus d'ailleurs, me confie-t-il en riant, après l'âpre et longue bataille qu'ils ont dû mener pour réussir leur première levée.

Tout a commencé fin 2011. Edouard Petit et Alexis Jamet s'ennuyaient un peu dans leur agence de communication quand ils ont fait, comme pas mal de leurs collègues, la crise du Powerpoint. Vous savez, ce moment où vous vous rendez-compte que vous n'en pouvez plus de faire (et de voir) des Powerpoints, mais vous ne savez pas comment faire autrement. Microsoft Powerpoint, c'est 95% du marché des présentations. Pour un milliard de licences vendues. Si on compte les versions piratées, autant dire que le monde entier utilise Powerpoint. Pas d'issue. Vous faites votre crise, et vous revenez chez Microsoft.

Alexis et Edouard, eux, ont décidé de créer Bunkr. Une alternative à Powerpoint pour aller plus vite et rester focus sur l'essentiel.

Quelques mois plus tard, ils se mettent au chômage pour pouvoir se consacrer à plein temps à leur projet. Et quittent Paris pour aller à Rouen, où les locaux sont beaucoup moins chers. Et comme faire des croquis c'est bien, mais qu'il faut aussi développer un logiciel, ils s'associent avec un troisième larron : Jean-Christophe Fossati, pour piloter la partie technique de l'opération.

En avril 2013, bébé Bunkr sort enfin dans sa version 1. En septembre, l'outil compte 35000 inscrits (50000 aujourd'hui). Mais pas beaucoup d'usage : 10 à 15% seulement.

Mais la traction est là, la start-up a bonne presse, gagne quelques concours, se fait draguer par pas mal de fonds, en Europe, en Asie, aux USA... bref, on sent que ces deux anciens d'agence de com n'ont pas perdu la patte.

Cette start-up a tellement d'audace qu'elle a failli ne pas lever d'argent en France. Aujourd'hui Bunkr part enfin à l'assaut de Microsoft

Passée la phase de buzz, lever des fonds, par contre, est beaucoup plus difficile. "On s'est pris d'énormes bâches", raconte Alexis. "Après trois due diligences qui ont échoué, on s'est dit qu'on était cuits. On n'était pas dans les critères : on ne sortait pas des grandes écoles, on cherchait des fonds en amorçage pour développer le produit et créer de l'usage plus que pour le vendre, ce qui est très compliqué en France."

Et puis surtout ils s'attaquent à un géant jusque là monopolistique. Et jamais détrôné.

Bref un scénario très français...

En janvier, les BunkrBoys sont donc complètement déprimés, et parlent de partir aux Etats-Unis... comme beaucoup d'entrepreneurs.

Et là, c'est le coup de théâtre. Pas celui auquel ils s'attendaient : ID Invest ne fait pas vraiment dans l'amorçage. Sauf quand ils flairent la pépite. Ils l'avaient déjà fait pour Criteo... Bonne pioche. Cette fois, ils ont décidé à nouveau de faire une exception. Séduits par l'audace un peu pirate de cette french team agressive, ils ont accepté de mettre au pot. Encouragés par deux autres célèbres "pirates" qui seront aussi de l'aventure, Xavier Niel et Daniel Marhely, le co-fondateur de Deezer.

Cette start-up a tellement d'audace qu'elle a failli ne pas lever d'argent en France. Aujourd'hui Bunkr part enfin à l'assaut de Microsoft

C'est la fin de six mois de montagnes russes. Bilan : moins de cheveux, plus de barbe. Une énorme ambition. Et un petit million pour partir à l'abordage du géant Microsoft.

Alors comment vont-ils s'y prendre ? En essayant de ne pas attaquer frontalement l'ennemi, mais en jouant la complémentarité et la disruption. On pourra importer son powerpoint sur Bunkr, pas seulement pour avoir une version en ligne et collaborative (Google le fait déjà), mais pour proposer une autre façon de faire des présentations : des présentations entièrement connectées, dans lesquelles vos données sont synchronisées. Par exemple vos tableaux excel, vos données, votre compte Twitter, LinkedIn ou Dropbox etc. "On veut faire de la présentation légère, qui ne pèse pas 3 gigas, et qui se monte très vite parce les données sont déjà là et que tu n'auras pas besoin de tout refaire pour la mettre à jour".

Audacieux programme donc. Que Bunkr pilotera toujours depuis Rouen. Jusqu'à se qu'elle se fasse draguer par Microsoft (hypothèse la plus plausible), Bunkr restera made in France. "On est présent dans 170 pays, alors qu'on soit à Rouen ou ailleurs, c'est pareil pour nous". C'est Arnaud qui va être content.

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