Benoît Raphaël

Vous ne connaissez pas Kinnernet ? Moi non plus au début, et j'ai été très surpris

9 Juin 2014 , Rédigé par Benoît Raphaël Publié dans #Kinnernet, #Conferences, #France, #innovation

Quand un ami a moi m'a gentiment proposé de participer à la seconde édition d'une conférence appelée Kinnernet en France, j'ai accepté sans réfléchir. Il m'avait juste dit : "il y a des gens formidables de tous les pays et c'est dans un petit village médiéval appelé Avallon". Bon, il y avait un L de trop à Avalon pour que ça puisse être la vraie Avalon, l'île du roi Arthur, mais il était évocateur. Et puis j'aimais bien l'idée des "gens formidables de tous les pays".

Après, je suis allé sur leur site, et là j'ai commencé à me poser des questions.

L'événement, qui se définit comme une "non-conférence", proposait des sessions ludiques et créatives, genre "on fait tous la cuisine ce soir", ou "on va apprendre à danser la valse" qui me faisaient plus penser à une colonie de vacances qu'à un rassemblement sur l'innovation. Même si le rassemblement était sponsorisé par des groupes prestigieux, tout ça faisait un peu communautaire, en mode on fait des jeux collectifs dans la nature, et ce n'était pas du tout mon truc.

(Photo officielle Kinnernet 2013)

(Photo officielle Kinnernet 2013)

En fait, Kinnernet ne peut pas être vraiment compris de l'extérieur. De loin, c'est un truc bizarre et informe, de l'intérieur, c'est une expérience absolument géniale et vivifiante. Une sorte de conférence qui serait régie par une mécanique de l'entropie et de la relation. Il y a du très bon et du moins bon, mais au final, on repart avec une énergie incroyable, et de nouveaux contacts.

Kinnernet est organisée tous les ans en Israel depuis 2003. A l'origine de ce rendez-vous "out of the box", qui s'inspire des Foo Camp de Tim'O'Reilly : l'investisseur Yossi Vardi. Sa petite soeur française, appelée Kinnernet Europe, a débarqué en France en 2013, grâce au dévouement de Marc Golberg et Jérome Cohen. D'autres sessions sont également organisée ailleurs en Europe et dans le monde.

Kinnernet est une "unconference", une "non-conférence", c'est à dire une conférence sans agenda. Les sessions sont proposées par les participants eux-mêmes, qui doivent l'inscrire sur un calendrier géant installé à l'entrée du bâtiment.

(Photo Kinnernet 2014 - BR)

(Photo Kinnernet 2014 - BR)

L'unconference se déroule dans le musée d'Avallon, dans les salles d'exposition, au milieu des statues ou des objets qui ont été, pour l'occasion, poussés contre les murs. On échange ainsi durant une petite heure au milieu de tenues traditionnelles du Viet-Nam, de statues grecques ou de tableaux régionaux (je n'ai pas bien compris quelle était la thématique du musée, j'avoue), parfois dans une salle d'archives remplies de boîtes en carton, près d'une table de travail comme abandonnée à la va-vite la veille... Tout est fait pour donner le sentiment d'un doux happening permanent. Ce qui n'est pas exactement vrai. L'entropie est réelle dans cet événement, elle provoquée pour favoriser les rencontres et la créativité. Mais dans les coulisses, à part le thème et les acteurs des échanges, la logistique est réglée comme du papier à musique.

(Photo Kinnernet 2014 - session de Francis Pisani - BR)

(Photo Kinnernet 2014 - session de Francis Pisani - BR)

Toute la qualité de l'alchimie de l'événement repose finalement sur ses participants. On ne s'inscrit pas à Kinnernet, on est invité. Les critères sont un peu flous. On ne cherche pas l'élite, plutôt la bonne recette. L'objectif est de rassembler des innovateurs de toute la planète connectés par un même état d'esprit : l'ouverture d'esprit, une volonté d'améliorer le futur. Et, un peu quand même aussi, un certain sens de la fête. Une seule règle : interdit de faire la promotion de son business.

Au final, il est très difficile de se faire un carte postale uniforme quand on repart d'un Kinnernet. C'est rassemblement un peu chaotique, et joyeux. Des artistes, des créateurs de start-ups, des penseurs de l’Internet, des investisseurs, des utopistes, des hackers, des patrons accessibles, un chercheur qui a inventé un avion solaire, un urbaniste qui veut implanter l’algorithme des arbres dans les immeubles pour qu’ils bougent, se transforment au rythme du vent, du soleil, de la vie. Une artiste qui peint les gens pour les placer dans les tableaux, des gens gentils, le fondateur historique de l'événement qui promène son ventre au milieu des autres en leur serrant la main, même quand il ne les connait pas, et dit “hello, who are you ?”

(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)
(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)
(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)
(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)
(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)

(Photos Kinnernet 2014 - Aude Baron et Liz Bacelar)

On parle de nos jouets d’enfance, des villes du futur, de l'utopie, du hacking, de la façon fausse dont nous percevons la réalité, d’un programme pour piloter les champs de maïs avec des robots, de comment la science-fiction continue d'influencer la recherche. On dîne ensemble, on boit, on fait la fête. Un concert classique organisé dans l’église d’à côté, des oeuvres digitales projetées sur la voute : une rivière, des nuages, des fleurs. Du vin. Des discussions dans la nuit. Des rires. Il y avait ce léger chaos, du génie et des moments médiocres, mais une sorte de plaisir de parler ensemble, de rêver un peu, de changer de façon de voir les choses, de se rencontrer.

Au final, le contraire d'une conférence traditionnelle. Mais bien plus : une formidable énergie, beaucoup d'optimisme sur la capacité des êtres humains à faire bouger les choses pour améliorer le monde et à croiser leurs expériences pour trouver de nouvelles idées. Et puis, surtout, plein de nouveaux contacts parmi des personnalités inspirantes. Et que l'on n'aurait jamais pu croiser autrement.

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