Acheter des livres sur Internet va vous coûter plus cher. Merci les députés
Entre tuer les libraires et tuer le livre, les députés (de droite comme de gauche) ont choisi. Désormais, acheter des livres sur Internet va coûter plus cher : les frais de port qui ne pourront plus être offerts, mais aussi la remise de 5%. Une remise voulue par la loi Lang pour... favoriser la lecture.
Objectif affiché : gêner Amazon et sauver les libraires qui ferment leurs magasins les uns après les autres parce que les amoureux de la lecture trouvent plus pratique de commander leurs livres sur le web. Salauds de lecteurs...
Sur Twitter, Stéphane Soumier ressort à raison la satire de Bastiat contre les protectionistes de tout bord : "la pétition des fabricants de chandelles et de réverbères" contre... le soleil.
Ce matin, en hommage au 577 députés dressés contre Amazon, nous avons relu la "pétition des producteurs de chandelle" http://t.co/DjExE73oQD
— Stephane Soumier (@ssoumier) October 4, 2013
Nous subissons l'intolérable concurrence d'un rival étranger placé, à ce qu'il paraît, dans des conditions tellement supérieures aux nôtres, pour la production de la lumière, qu'il en inonde notre marché national à un prix fabuleusement réduit; car, aussitôt qu'il se montre, notre vente cesse, tous les consommateurs s'adressent à lui, et une branche d'industrie française, dont les ramifications sont innombrables, est tout à coup frappée de la stagnation la plus complète. Ce rival, qui n'est autre que le soleil, nous fait une guerre si acharnée, que nous soupçonnons qu'il nous est suscité par la perfide Albion (bonne diplomatie par le temps qui court!), d'autant qu'il a pour cette île orgueilleuse des ménagements dont il se dispense envers nous. »
« Nous demandons qu'il vous plaise de faire une loi qui ordonne la fermeture de toutes fenêtres, lucarnes, abat-jour, contre-vents, volets, rideaux, vasistas, œils-de-bœuf, stores, en un mot, de toutes ouvertures, trous, fentes et fissures par lesquelles la lumière du soleil a coutume de pénétrer dans les maisons, au préjudice des belles industries dont nous nous flattons d'avoir doté le pays, qui ne saurait sans ingratitude nous abandonner aujourd'hui à une lutte si inégale.
On aurait pu écrire la même pétition avec l'électricité. Ça me rappelle cette histoire que je lisais étant enfant, l'allumeur de réverbères, dont le métier est en train de disparaitre à cause de l'électricité. Introuvable aujourd'hui... même sur Internet...
L'objectif des députés est donc de freiner le "méchant" Amazon qui nous fait l'affront d'être plus innovants que nous. Et qui opposerait une concurrence déloyale aux libraires. Comme le rappelle le directeur de la communication de la Fnac, le problème est ailleurs : notamment l'avantage fiscal dont bénéficie Amazon qui opère depuis le Luxembourg.
En attendant, acheter un livre va coûter plus cher. C'est peut-être la "faute" d'Amazon si les Français préfèrent acheter leurs livres sur Internet, mais enfin c'est surtout parce que c'est plus pratique.
Déjà, sur le Kindle d'Amazon, les livres en français sont plus chers dans leur version numérique que dans leur version papier. Impossible également d'avoir une version poche.
C'est sans doute ce qui a permis à de jeunes auteurs refusés par les maisons d'édition de trouver le succès en vendant leurs ouvrages à compte d'auteur à 89 centimes... Un autre pied de nez à... un autre lobby.
Bref, Messieurs les allumeurs de réverbères, si les librairies sont menacées, la lecture a de l'avenir. Je comprends que l'on ait envie d'aider une profession en déclin, mais il y a certainement d'autres moyens que de pénaliser les lecteurs. Notamment les moins fortunés d'entre eux.
Qu'est-ce qu'un libraire aujourd'hui dans un monde connecté ? Voilà un beau sujet de réflexion pour les députés...