Benoît Raphaël

Jay Rosen : "Les gens se détournent des mass médias pour se tourner les uns vers les autres"

2 Septembre 2010 , Rédigé par Benoit Raphaël Publié dans #Daily, #jay rosen, #journalisme, #Média participatif, #médias

Quelques traits de lumière issus de la leçon inaugurale de l'école de journalisme de Sciences-Po Paris, donnée ce jeudi matin par Jay Rosen. (Pour ceux qui ne le connaissent pas, Jay Rosen enseigne le journalisme à la NY University, est l'auteur du blog "Press Think" et est à l'origine d'un certain nombre d'expérimentations dans le domaine du journalisme participatif, News Assigment et l'opération "Off the bus" pour le Huffington Post.)

- Nous sommes passés d'une logique d'audience (passive et isolée) à une logique de public (compris comme une place publique, dont les citoyens sont actifs et parlent entre eux). - Le pouvoir a changé de mains.

- Les gens se détournent des mass médias pour se tourner les uns vers les autres. - Quand vous considérez les gens comme une masse, vous les réduisez à l'état de formule. Quand vous voyez les gens comme un "public", vous leur fabriquez des infos qu'ils vont pouvoir utiliser (pour s'informer, pour agir...). Ils deviennent utilisateurs.

- Les journalistes ne trouvent pas des infos pour des lecteurs, ils fabriquent des informations pour des utilisateurs ("users")

- Les utilisateurs (vus comme un réseau) en savent plus que vous. La question est: comment toute cette connaissance peut m'aider à mieux faire mon travail de journaliste ?

- Le journalisme est désormais une relation mutuelle avec des gens qui étaient considérés auparavant comme une audience ("the people formely known as an audience").

- Le problème c'est que la plupart de vos professeurs (ici à l'école de journalisme) ne savent rien de ce changement de pouvoir. Vous devrez donc apprendre par vous-même !

- Ce n'est pas parce que les gens peuvent participer à l'information qu'ils le font. 90% se contentent de lire. 10% participent. Seulement 1% sont vraiment actifs.

- Etre journaliste ce n'est pas faire partie d'une classe. Ce n'est pas comme être un neurochirurgien ou un pilote de boeing. Vous n'avez pas besoin d'un permis pour ça. Ce n'est pas exclusif. Le journaliste est juste un cas plus intense de citoyen informé. Les gens vous écouteront parce que vous leur apporterez quelque chose qu'ils ne savent pas (et qui leur est utile) pas parce que vous êtes journaliste et habilité à apporter des informations. Tout le monde peut le faire. Le journaliste en fait son métier.

- Vous devez écouter les besoins des gens, mais si vous ne leur donnez que ce qu'ils veulent, ou que ce que vous voulez, vous perdrez votre autorité. Vous devez également donner aux gens ce qu'ils ne savent pas qu'ils veulent.

- Les gens adorent commenter l'info. Avant de considérer les commentaires, la participation, comme un chaos ou une distraction, dites vous d'abord que la possibilité de commenter leur donne une nouvelle soif d'information.

- Le journaliste n'est pas objectif. Affirmer le contraire ne convainc personne et ne mène qu'à la perte de confiance et de respect envers la profession. Le journaliste doit dire la vérité, mais il doit surtout dire qui il est et d'où il vient, il doit dire "voici ma perspective" sur cette info.

- Pour de nombreux événements, il y aura toujours des gens capables d'en parler mieux que les journalistes. Vous devez vous y habituer. Le témoignage citoyen est une part du journalisme d'aujourd'hui. Par contre, il y aura toujours besoin de collecter et de trier.

- Le tri est une autre valeur que le journaliste peut apporter.

- Il n'y aura jamais trop d'informations, mais un problème de filtrage.

- Il y aura toujours de plus en plus de contenus, vous ne pourrez pas l'empêcher. Les gens continueront de bloguer, d'envoyer des photos et des vidéos. Au lieu de nous plaindre, inventons des outils pour gérer le flux.

- Sur le datajournalisme : le rôle du journalisme est de rendre les données disponibles sur Internet facile à utiliser.

- La crise des business models est une crise de la publicité :

1) Crise de la rareté: de plus en plus de pages sur Internet, de plus en plus d'espace pour la pub, donc des tarifs de plus en plus bas.

2) Les annonceurs ne sont pas dans le business de la pub. Leur métier ce n'est pas d'annoncer mais de vendre leurs produits. C'est pour ça que le search (comme Google Ads), il améliore l'efficacité de la pub pour vendre un produit. - La solution  ? "Je ne vois pas de solution à la crise publicitaire. Nous devons trouver de nouvelles sources de revenus."

MAJ : Extrait en vidéo de la conférence chez Alice Antheaume et un résumé un peu plus structuré que le mien chez Eric Scherrer.

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